Cameroun : Du Grand Nord aux rues de Yaoundé : le long voyage de l’arachide, entre succès commercial et précarité

 

À Yaoundé, sous le froid glacial de la capitale en ce mois de juillet, une odeur familière chatouille les narines : celle de l’arachide. Venue tout droit du Grand Nord, cette légumineuse, incontournable dans la gastronomie camerounaise, irrigue les marchés de Yaoundé et nourrit un commerce animé.

Arrivés par camions entiers des régions de l’Adamaoua, de l’Extrême-Nord et du Nord, les sacs d’arachide de 100 kg s’amoncellent dans les allées du marché du 8ème à Tsinga, véritable plaque tournante de ce commerce. <<Le sac se négocie entre 45 000 et 50 000 francs CFA actuellement>> explique Oumarou, vendeur originaire de l’Extrême-Nord.
Autour de lui, dans un mélange de français hésitant et de fulfuldé, la langue dominante du marché, les vendeurs s’affairent. <<Les clients ? Ce sont surtout les femmes qui revendent en détail, les restaurants, parfois des particuliers>> détaille Yaya, le regard tourné vers les sacs encore pleins. <<Mais la vente a baissé, les temps sont durs>>.
Pourtant, l’arachide continue de s’écouler, se transformant au gré des étals. Au marché Mokolo, Hadidja, le visage marqué par le froid en ces temps de juillet, grille les graines avec dextérité. <<Demandez les arachides, elles sont bien croustillantes !>> lance-t-elle aux passants, avec un sourire. Installée là depuis deux ans, elle transforme l’arachide en sachets de 50 ou 100 francs CFA, un petit plaisir accessible à tous.
Plus loin, au carrefour Warda, c’est Hadidjatou qui propose ses produits : caramel d’arachide, pâte à tartiner… <<Je vends trois fois par semaine, quand je n’ai rien d’autre à faire>> confie-t-elle. Une activité d’appoint, essentielle pour <<payer le sel, le cube maggie et aider la famille>>.
Tout de même, derrière le succès commercial de l’arachide se cache une réalité plus sombre. La précarité des vendeuses, souvent livrées à elles-mêmes dans les rues de Yaoundé, interpelle. Victimes d’agressions, exposées aux intempéries, ces femmes courageuses, maillons essentiels de la filière, méritent une meilleure protection et un encadrement digne de leur contribution à l’économie locale.
L’arachide du Grand Nord, bien plus qu’un simple produit, raconte l’histoire d’un commerce dynamique, mais aussi d’une lutte quotidienne pour la survie. Un paradoxe qui mérite que l’on s’y attarde, au-delà du plaisir gustatif.

Par Akimas GAKNONÉ GABDOULBÉ

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