Afrique : Retrait des troupes américaines du Niger et expansion russe : quelles conséquences pour le Sahel ?
Le récent retrait des forces américaines du Niger marque un tournant significatif dans la géopolitique du Sahel, une région déjà tourmentée par des conflits persistants et des défis de développement. Cette évolution soulève des questions cruciales sur l’avenir de la sécurité régionale et l’influence croissante de la Russie, ainsi que d’autres acteurs internationaux comme l’Iran et la Chine.
La décision du Niger de mettre fin à un accord militaire avec les États-Unis, qui avait autorisé l’établissement d’une base de drones américaine sur son territoire, suggère une réévaluation significative de ses alliances stratégiques. Cette base, cruciale pour les opérations anti-terroristes américaines, notamment contre des groupes comme l’État Islamique et Boko Haram, est vue comme un pilier de la stratégie de contre-terrorisme dans le Sahel. Le départ américain pourrait ainsi laisser un vide sécuritaire que d’autres puissances sont prêtes à exploiter.
L’influence russe, déjà palpable dans plusieurs pays africains via des accords de sécurité avec le Mali, le Burkina Faso, la Libye et la République centrafricaine, semble prête à s’étendre. La Russie, à travers des groupes comme Wagner, a non seulement renforcé sa présence militaire mais aussi engagé des actions de désinformation et de soutien à des régimes autoritaires, ce qui soulève des inquiétudes quant à ses véritables intentions. La création de l’ « Africa Corps », pilotée par le renseignement russe, illustre cette ambition de transformer l’influence mercenaire en une présence plus institutionnalisée.
Le renforcement de la présence russe dans le Sahel, souvent aligné avec des régimes peu démocratiques, représente un défi majeur pour la stabilité régionale. Les activités de désinformation et les appuis aux gouvernements autoritaires suggèrent une stratégie de Moscou visant plus à évincer les influences occidentales et à s’assurer des avantages géostratégiques qu’à contribuer réellement au développement ou à la stabilisation de la région. Les implications pour les aspirations démocratiques et la souveraineté des États du Sahel sont donc complexes et potentiellement problématiques.
Alors que le Sahel continue de lutter contre des défis sécuritaires et de développement considérables, le retrait américain et la montée en puissance de la Russie pourraient redéfinir les équilibres de pouvoir dans la région. Pour les pays du Sahel, il devient impératif de naviguer avec prudence dans ce nouvel environnement géopolitique, en équilibrant soigneusement leurs alliances tout en cherchant à préserver leur intégrité et leur autonomie politique.
Par Eric Guedeng Ledjebgue, avocat au barreau de Washington DC