Afrique centrale : Les rapports avec la France à l’épreuve des disparités entre les États de la sous-région ?

 

La France, jadis hyper influente dans les pays d’Afrique centrale fait désormais face aux puissances rivales en l’occurrence la Chine et la Russie. Le jeu des acteurs peut-il saboter la cohésion entre les Nations de la zone tournées vers les forces extérieures distinctes ? Analyse d’une situation au centre de la géostratégie.

La françafrique serait –elle en train de s’effriter dans les États de l’Afrique centrale notamment le Cameroun, le Tchad et la Rca ? Ces trois pays présentent une nouvelle configuration géostratégique opposant Paris en perte de vitesse sur le terrain, tandis que ses concurrents, Moscou et Pékin, montent en puissance. Entre les défis sécuritaires et économiques, la diplomatie des forces en présence dans les territoires courtisés, fait usage de tous les moyens de la dissuasion pour ramener une ou plusieurs parties à épouser l’idée du conquérant. A titre illustratif, lors de la visite du président français Emmanuel Macron au Cameroun au mois de juillet 2022, le patron de l’Élysée a tenté de convaincre son homologue Paul Biya à condamner la Russie dans le conflit qui l’oppose à l’Ukraine. Il obtiendra de son interlocuteur une réponse suffisamment expressive de ses engagements avec la Russie de Vladimir Poutine. ‘’Je ne vois pas en quoi la Russie constitue un danger pour le Cameroun’’, laissera entendre le chef d’État camerounais. L’on ne saurait envisager une telle réaction de la part d’un dirigeant d’Afrique noire francophone trente ans voire quarante ans en arrière. La Rca ne fait l’objet d’aucun doute sur sa collaboration réduite avec la France. Faustin Archange Touadéra a renforcé sa coopération avec la Russie. Ce qui n’est pas du goût de Paris. Mais le Gabon et le Congo Brazzaville sont restés fidèles à la France.
Cette différence dans les rapports entre les États de la sous-région et les puissances étrangères diamétralement opposées dans la vision du monde et de l’Afrique peut-elle causer des fractions au sein de la communauté ? ‘’L’enjeu des grandes puissances c’est d’avoir un pied en Afrique centrale et de pouvoir peser dans les décisions qui pourront influencer la marche des États. La France perd progressivement son influence dans son pré carré d’hier visible par le jugement qu’ont les populations de la France, les actions des sociétés civiles et les panafricanistes, qui tous ensembles n’adhèrent plus à l’option d’une mainmise de Paris dans la gestion d’États. En réalité le mythe d’une France toute puissante serait révolu. ’’
L’analyse d’Aimé Mbounoung, chercheur et enseignant en sciences politiques de l’université de Yaoundé II Soa, met en lumière les finalités des protagonistes en mouvement dans la zone, mais aussi elle sert de compréhension sur le sentiment anti-français en progression. A la suite de sa réflexion, il met en accent particulier sur les discordances observées dans les pays de la sous-région. ‘’Il est difficile en Afrique centrale de fédérer les forces pour une coopération multipolaire dans le domaine de la monnaie, de la défense, de la diplomatie etc. Les relations entre les chefs d’État majoritairement souverainistes, font obstacles à une véritable union des États. Pourtant il existe une coalition réelle des Etats contre Boko Haram parce que le groupe présente une menace globale pour les pays de la sous-région. La diplomatie en Afrique centrale est celle des amis ; les dirigeants se mettent ensemble par affinité pour résoudre des problèmes précis’’.
Malgré les discours et les rencontres entre les dirigeants de la sous-région en vue d’appliquer une vision globale en matière de libre circulation des biens et des personnes ; de la mise en pratique du passeport commun pour les citoyens de la sous-région, ces mesures restent des promesses sur fond de suprématie et de protectionnisme des gouvernants.

Par William Omer Tchuisseu

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