Tanzanie: Une élection sous contrôle : Samia Suluhu Hassan vers un mandat sans surprise
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Les Tanzaniens se sont rendus aux urnes ce mercredi 29 octobre 2025 pour élire leur président, leurs députés et leurs représentants locaux. Mais le scrutin, tenu dans un climat de méfiance et de peur, ne laisse guère de place au suspense. La présidente sortante Samia Suluhu Hassan, arrivée au pouvoir en 2021 après le décès de John Magufuli, se dirige sans surprise vers un premier mandat électif, après avoir méthodiquement neutralisé ses principaux adversaires.
Une opposition muselée et un scrutin verrouillé
Sur le papier, seize candidats figurent sur la liste officielle. Dans les faits, aucune figure majeure de l’opposition ne participe réellement à la course. Le chef du parti Chadema, Tindu Lisu, considéré comme le principal rival de Samia Suluhu, a été disqualifié du scrutin. D’autres opposants, critiques du régime, ont été emprisonnés ou contraints à l’exil, dénonçant une élection « sans équité ni transparence ».
Les observateurs indépendants, comme plusieurs organisations de la société civile, parlent d’un processus électoral « verrouillé de bout en bout », orchestré pour garantir une victoire écrasante du Chama Cha Mapinduzi (CCM), parti au pouvoir depuis l’indépendance.
Un climat de tension et de peur
Dans les rues de Dar es Salaam comme à Zanzibar, les scènes habituelles d’affluence électorale ont laissé place à un calme pesant. Les chars déployés aux abords des bureaux de vote et la présence massive des forces de sécurité ont contribué à refroidir les ardeurs des électeurs.
Les médias étrangers, souvent jugés trop critiques, n’ont pas obtenu d’accréditation pour couvrir l’événement. Les journalistes locaux, eux, opèrent sous la menace de sanctions. Cette atmosphère d’intimidation alimente la méfiance des citoyens vis-à-vis d’un processus électoral déjà jugé joué d’avance.
Une démocratie sous respiration artificielle
Dans un pays de 68 millions d’habitants, longtemps présenté comme un modèle de stabilité en Afrique de l’Est, la trajectoire politique actuelle inquiète. La Tanzanie semble s’enfoncer dans une ère d’autoritarisme feutré, où les institutions servent davantage à légitimer le pouvoir en place qu’à garantir la souveraineté populaire.
Des voix au sein de la société civile appellent néanmoins à la patience et à la persévérance démocratique. « Ce qui se passe aujourd’hui n’est pas une fin, mais une étape », confie un militant des droits humains basé à Arusha. « Le peuple tanzanien finira par reprendre la parole. »
Vers une victoire annoncée
Tout indique que Samia Suluhu Hassan, première femme à diriger la Tanzanie, sera reconduite pour un mandat plein. Mais ce triomphe électoral, obtenu sans véritable concurrence, pourrait s’avérer un succès à la légitimité fragile.
Dans un contexte régional marqué par des aspirations démocratiques contrariées, le scrutin tanzanien rappelle tristement que, dans certaines capitales africaines, le pluralisme politique reste encore un combat inachevé.
Par Rodrigue Izumo

