Tchad: « Je souhaite que l’heure du couvre-feu soit ramenée à 23 heures pour nous permettre de travailler » dixit une prostituée

La pandémie du Coronavirus fait beaucoup de dégâts en terme de pertes en vies humaines dans le monde. Mais sur le plan économique, beaucoup d’entreprises payent aussi les frais. Les travailleuses du sexe au quartier chagoua appelé communément marché mokolp ne sont pas du reste. Elles subissent de plein fouet, les conséquences de la crise sanitaire de l’heure. Nous avons rencontré pour vous Fatimé , elle nous parle de son quotidien depuis le début du Codid-19 au Tchad. Lisez

Journal l’œil du Sahara : Bonsoir Mlle. Présentez-vous à nos lecteurs s’il vous plaît.

Fatimé : Je suis Fatimé 25 ans. J’habite à Kamda. Je fais le trottoir dans la zone du chagoua . Mes clients m’appellent affectueusement ”fatimé la douce”.

Journal l’œil du Sahara : avez vous des difficultés pendant ce moment de crise sanitaire ?

Fatimé : Effectivement, depuis un moment c’est très dur. La Covid-19 a bouleversé toutes nos activités. Cela s’est encore compliqué avec le couvre-feu. Lorsque le couvre-feu n’était pas encore instauré, au moins je ramenais quelque chose à la maison.

Journal l’œil du Sahara : Comment gérez-vous alors vos charges ? Loyer, nourritures… ?

Fatimé : Mon frère c’est difficile à vous expliquer les moments que je traverse. Actuellement j’ai deux mois deux loyers impayés. Je suis en train de penser à libérer la chambre-salon et prendre une pièce. Pour manger, c’est un parcours de combattant. Parfois je fais le carême forcé.

Journal l’œil du Sahara : Avez-vous les nouvelles de vos clients?

Fatimé : Non, pas vraiment. Nos meilleurs clients, ce sont les hommes mariés. Mais avec la pandémie, ils ne sortent plus, ils protègent leur famille contre le Coronavirus. Je les comprends mais nous on a faim en ces moments. Les jeunes n’ont pas les moyens pour bien nous gérer comme les boss mariés le font. En plus certains clients ne décrochent plus mes appels. Parmi eux 20 clients ont bloqué mon numéro.

Voici le message que j’ai eu de la part d’un client avant qu’il me bloque.’’ Fatimé bonjour, en cette période de Coronavirus, je ne sors plus comme avant. Je prends soins de ma famille. On se verra après la pandémie’’. Vous-mêmes vous avez tout compris j’espère. Je meure de faim parce que mes clients m’ont fuit à cause du Coronavirus.

Journal l’œil du Sahara : Quelles sont les précautions que vous prenez avant les rapports sexuels avec vos clients ?

Fatimé : Je porte le masque, des gants, j’ai aussi du gel désinfectant dans mon sac que j’utilise. Tous les clients aussi doivent prendre ces dispositions avant qu’on ne passe à l’acte. J’ai eu un client la semaine passée qui a refusé de respecter ces mesures. Comme j’avais faim et c’était le seul client que j’ai eu cette soirée, j’étais obligée de faire avec.

Journal l’œil du Sahara : Dites-nous avec le couvre-feu, à quelle heure vous venez ici?

Fatimé: Humm, 18h 30 minutes habituellement. Mais ça ne donne rien, à peine tu gagnes un client. Depuis le début de la pandémie, j’ai éssayé 4 fois dans la semaine, ça n’a pas marché. J’ai du abandonner pour un temps. Je sors uniquement le week-end, avec le couvre-feu c’est dur à gérer.

Le samedi passé, j’ai trouvé un client à 18 heures 15, le temps de conclure le prix, il était déjà 19 heures. Arrivée dans la chambre de passage, à peine on a fait 5 minutes. La peur d’être rattrapé par le couvre-feu, le client disait qu’il habite à Djari. Je souhaite que l’heure du couvre-feu soit ramenée à 23 heures pour nous permettre de travailler.

Journal l’œil du Sahara : N’avez-vous pas d’autres stratégies pour avoir les clients en cette période ?

Fatimé : J’ai crée une page facebook sur laquelle je poste quelques photos sexy pour attirer les gens. Mais cela aussi ne marche pas. Ce sont des élèves, étudiants qui me contactent. En plus ils proposent des prix pas intéressants. J’ai dû bloquer la page pour l’instant. Je suis toujours en train de réfléchir pour trouver d’autres stratégies. Le souci actuellement, c’est que les élèves, étudiantes, coiffeuses, couturières sont toutes à la maison. Elles nous piquent aussi nos clients.

Journal l’œil du Sahara : Merci pour votre disponibilité.

Fatimé: Je vous en prie, je profite pour faire un coucou à tous vos lecteurs et tous à mes clients.

Propos recueillis par kenzo Brown.

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