Côte d’Ivoire: Le pays rouvre ses frontières terrestres
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La réouverture des frontières terrestres est entrée en vigueur jeudi 16 janvier 2023 au matin. Elles étaient fermées depuis le 22 mars 2020 pour lutter contre la propagation du Covid-19.
La fermeture des frontières terrestres en vigueur depuis bientôt trois ans est désormais levée, en raison de « l’évolution sanitaire et économique favorable », indique le Conseil des ministres. Le mois dernier déjà, le Conseil national de sécurité avait annoncé une levée progressive de ces mesures de prévention.
Cette décision vise à mettre fin aux voies de passage clandestin et réorienter les voyageurs vers les passages officiels. Car jusque-là, les gens empruntaient des pistes non surveillées, selon plusieurs habitants de Ouangolodougou, ville proche de la frontière avec le Burkina Faso. « Cela devrait permettre une redirection de ces flux de personnes vers les passages officiels de traversée, afin d’assurer un meilleur contrôle des flux migratoires », explique Amadou Coulibaly, le ministre porte-parole du gouvernement.
Le dernier Conseil national de sécurité a noté un « afflux récent » de 8 700 réfugiés burkinabè fuyant les violences dans leur pays. Les autorités ivoiriennes veulent les identifier et aménager des sites d’accueil.
la réouverture des frontières terrestres accueillie avec joie à la frontière Côte d’Ivoire Ghana
C’est « la fin du calvaire pour toute la population », se réjouit le chef du village ivoirien de Noé, frontalier du Ghana: fermées depuis le Covid-19, les frontières terrestres de la Côte d’Ivoire viennent de rouvrir.
De nombreux habitants de cette localité vont enfin pouvoir retrouver leurs proches vivant juste à côté, au Ghana, qu’ils n’ont pas revus depuis mars 2020 quand les frontières ont fermé à l’apparition de la pandémie.
« Je n’ai pas vu une partie de ma famille, ni certains de mes amis depuis trois ans: cet après-midi, je pars au Ghana pour les saluer enfin », dit avec émotion Eloukou Yapo, un habitant de Noé.
« Certains habitants de Noé ont même attendu à la frontière », tôt jeudi matin après son ouverture, car « ils n’y croyaient pas », assure cet enseignant qui est aussi président du groupement des jeunes du village.
Le même jour, sous les immenses arches en métal situées aux extrémités du pont qui sépare Noé d’Elubo, au Ghana, Ghanéens et Ivoiriens et d’autres Ouest-Africains affluent dans les deux sens à pied, en voiture, en car ou à moto.
En moins d’une heure, trois cars de voyageurs nigériens passent la frontière pour se rendre à Abidjan.
A Noé, tous doivent encore se soumettre aux contrôles douaniers et à des tests anti-Covid, mais les chauffeurs sourient, soulagés.
Eloukou Yapo raconte qu’on « ne pouvait traverser la frontière que pour des évènements importants, comme des funérailles et même pour ça, on devait +s’arranger+ avec les garde-frontières ».
Les jeunes de Noé – qui représentent entre 60% et 70% des quelque 5.000 habitants du village – ont vécu des années « très, très compliquées » selon lui, surtout professionnellement.
« La plupart d’entre eux sont commerçants, ils vont au Ghana pour acheter des produits et les revendent ici », explique-t-il. Si la frontière ivoiro-ghanéenne – longue de presque 700 km – est fermée, le commerce y est impossible et les rentrées d’argent inexistantes. « Certains se sont reconvertis en chauffeurs, ou dans la maçonnerie ».
« A l’annonce de l’ouverture des frontières, j’ai dansé! Vraiment c’est une bouffée d’oxygène pour nous », confirme Adama Madougou Hassan, un commerçant.
« Trajets dangereux »
Les produits achetés au Ghana « sont beaucoup moins chers » selon Eloukou Yapo, « à tel point que certains clients venaient parfois d’Abidjan », à environ 175 km à l’ouest de Noé.
Selon ses habitants, Noé est la localité ivoirienne qui compte le plus d’échanges commerciaux avec le Ghana.
Les deux peuples partagent également des similitudes culturelles, et appartiennent parfois aux mêmes ethnies, ce qui facilite les échanges.
C’est la fin d’un « calvaire pour toute la population », affirme le chef du village de Noé, Nanan Assi Atchan II. « Pendant ces trois ans, certains habitants ont risqué leur vie » lors de « trajets dangereux », pour braver l’interdiction. « Ils se sont fait passer pour des pêcheurs », ont pris une pirogue et « traversé la rivière », explique-t-il.
La Côte d’Ivoire, frontalière du Ghana, mais aussi du Liberia, de la Guinée, du Mali et du Burkina Faso, a été relativement épargnée par le Covid-19 avec environ 800 morts, selon les chiffres officiels.
Des millions de personnes originaires de ces pays vivant sur le sol ivoirien ont dû pendant trois ans emprunter des chemins de traverse clandestins pour se rendre dans leur pays d’origine et continuer à commercer. Et les prix des transports entre la Côte d’Ivoire et ses voisins avaient bondi.
En annonçant la réouverture des frontières mercredi, le gouvernement avait invité « tous les voyageurs à passer désormais par les voies de passage officielles ».
Un moyen de pouvoir à nouveau contrôler les flux migratoires, alors que la Côte d’Ivoire est en particulier confrontée à un afflux de réfugiés du Burkina Faso qui fuient les violences jihadistes dans leur pays. Quelque 8.700 d’entre eux sont récemment arrivés dans le nord, selon les autorités ivoiriennes.
Par Ousmane Diallo