RDC : La condamnation à mort de plusieurs « kulunas » suscite des inquiétudes

 

Depuis décembre 2024, les autorités congolaises mènent une vaste opération contre les « kulunas », des gangs urbains réputés pour leur violence dans plusieurs villes du pays. Cette opération coup de poing a conduit à l’arrestation de centaines de présumés délinquants, dont plusieurs ont été jugés en procédure de flagrance et condamnés à la peine de mort.

Des transferts et des déclarations alarmantes

Le ministre de la Justice, Constant Mutamba, a récemment supervisé le transfèrement des condamnés vers la prison d’Angenga, connue pour ses conditions de haute sécurité. Lors de cet événement, filmé et largement diffusé dans les médias, il a déclaré sans détour :
« On va exécuter la peine de mort, sachez que vous n’allez pas retourner ici, on ne veut plus entendre parler des kulunas. »

Ces paroles ont rapidement suscité des réactions, notamment de la part d’Amnesty International, qui craint des exécutions imminentes. Sarah Jackson, directrice régionale adjointe de l’organisation, a exhorté le président Félix Tshisekedi à s’opposer à tout projet d’exécution, dénonçant l’absence de garanties pour des procès équitables.

Retour en arrière sur la peine de mort

En mars dernier, les autorités congolaises ont mis fin au moratoire sur l’application de la peine de mort, en vigueur depuis 2003. Cette décision a été justifiée par la nécessité de répondre à des situations de crise, notamment la rébellion dans l’est du pays et l’insécurité grandissante dans les grandes villes.

Toutefois, pour Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits humains, l’utilisation de la peine capitale dans des procédures expéditives, comme les jugements en flagrance, constitue une violation grave des droits fondamentaux.

Un climat de tension croissante

Cette situation intervient dans un contexte de tensions exacerbées en RDC. Alors que l’insécurité persiste à l’est, avec plus de 100 000 déplacés en une semaine en raison des combats, les autorités cherchent à renforcer leur emprise dans les zones urbaines où l’activité des « kulunas » crée un climat d’instabilité.

Cependant, la reprise des exécutions, en contradiction avec les avancées internationales en matière d’abolition de la peine de mort, risque d’accentuer les critiques contre le gouvernement congolais. Amnesty International rappelle que la peine de mort est abolie dans une majorité de pays à travers le monde et que son application, surtout dans des contextes de justice expéditive, peut être assimilée à des violations des droits de l’homme.

Un appel à la retenue

Dans ce climat tendu, de nombreuses voix appellent à une réforme de la justice plutôt qu’à des sanctions extrêmes. Les organisations internationales insistent sur la nécessité de respecter les garanties d’un procès équitable et de privilégier des mesures qui s’inscrivent dans le respect des droits humains.

La question de la peine de mort reste un sujet profondément diviseur en République démocratique du Congo, où les défis sécuritaires se heurtent aux exigences des droits humains. Le président Félix Tshisekedi devra clarifier sa position dans les jours à venir pour éviter que cette situation ne dégénère davantage.

Par Jérôme Wailifu 

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